Tous les vivants de C.E. Morgan

Editions Gallimard, 2020

« Aloma n’avait jamais vécu dans une maison comme celle-ci et maintenant qu’elle la voyait, elle n’était plus très sûre d’en avoir envie mais elle aime Orren, alors supportera-t-elle cette vie dans cette région rude du Kentucky avec des cultures de tabac à perte de vue qu’elle voit au travers des rideaux déchirés de cette vieille maison où les murs de pierre et de terre s’effritent ».

Aloma et Orren sont deux jeunes orphelins ; ce qui les lient et les rapprochent et en même temps quelques différences de caractère les séparent, lui est taciturne et taiseux presque violent, juste rude, elle est douce et sensible et de plus elle est dotée d’un talent rare pour le piano.

Orren sait travailler la terre, ce sol pierreux pourvu d’herbes hautes qu’il travaille et qu’il doit entretenir seul suite à la disparition de sa famille. Les mains d’Orren ont eu l’habitude d’être endurantes celles d’Aloma sont faites pour l’art. Un jour elle décide d’aller à l’église du village car elle sait qu’il y a un piano et elle a tant besoin d’effleurer les touches et d’entendre sa résonance. Bell Johnson le pasteur de Falls Creek lui propose de venir jouer à la messe le dimanche ce qui lui permettra de gagner un peu d’argent. Jouer sera pour Aloma un refuge et une échappatoire à ses tourments intérieurs. Le piano est à la fois une passion et une forme d’expression de ses émotions les plus profondes qu’elle ne peut exprimer autrement qu’à travers la musique. Aloma commence à se sentir tirailler entre désirs et devoirs. Va-t-elle se soumettre aux engagements du couple ?

L’écriture de C.E Morgan est d’une beauté poétique et évocatrice nous transportant à travers les paysages sauvages du Kentucky et nous plonge dans l’intimité des pensées et des émotions des personnages. L’auteure nous entraîne vers les peurs, les tourments et les contradictions de l’âme humaine. Elle nous emmène en procession vers une introuvable terre promise. Le talent de C.E. Morgan s’est imposé à moi dès l’instant où elle a mis en lumière ce très beau portrait de femme déchirée entre son désir de conserver sa liberté et son devoir d’être une compagne courageuse pour Orren.

La passeuse d’histoires

de Séjal Badani

Charleston 2020

Jaya, américaine d’origine indienne en proie à des épreuves personnelles cherche la guérison en se rendant en Inde pour se reconstruire. Sa quête la conduit à Ravi, un intouchable proche de sa famille, qui devient son guide dans sa quête de vérité.

Au fil de son voyage Ravi dévoilera à Jaya l’histoire poignante de sa grand mère Amisha, marquée par les bouleversements politiques de l’Inde pré-indépendante, amours interdits, sacrifices. C’est une immersion émotionnelle que va faire Jaya dans la vie d’Amisha ce qui suscite en nous une grande empathie pour cette femme courageuse et inspirante. Les deux femmes reliant passé et présent, et malgré les décennies qui les séparent, ont des similitudes frappantes dans leurs vies. Jaya en explorant les évènements passés se réconciliera-t-elle avec son histoire personnelle.

Une histoire romanesque qui nous ouvre la porte d’un monde insoupçonné et qui nous pousse à l’humanité et à la réflexion comme beaucoup de romans des éditions Charleston qui sont d’une grande qualité littéraire. Un roman passionnant qui invite aussi au voyage.