Une heure de ferveur

de Muriel Barbery

Haru Ueno est sur le point de mourir, il remonte cinq décennies en arrière pour revisiter les questions qu’il s’était posées alors, avec le regard apaisé d’un homme qui ne redoute plus rien même pas ses réveils tourmentés. Il se souvient de sa rencontre avec Keisuke chez le producteur Tomoo Hasegawa où les jeunes artistes apportaient leurs oeuvres pour les faire admirer. Haru n’avait pas le talent d’un artiste mais il avait beaucoup de goût alors il louait des lieux éphémères et y présentait lui aussi des oeuvres choisies, il devint par la suite un marchand d’art très fortuné. Il se souviendra de sa rencontre avec la femme aux cheveux roux et aux yeux verts, Maud une française très spéciale qu’il a aimée brièvement. En dix nuits elle ne lui a pas adressé dix mots puis un matin elle partit pour la France pour ne plus réapparaître. Haru est bouleversé lorsqu’il apprend qu’elle est enceinte. Il est sûr que cet enfant est de lui et que ce sera une fille. Maud lui interdit de la voir et lui demande de lui pardonner.

Puisqu’il ne peut changer son destin, nous suivons Haru Ueno dans sa quête de rédemption, il s’aidera de la méditation pour comprendre les choses visibles et invisibles ; cherchera des réponses auprès de ses ancêtres. Il reverra Maud en songe, retracera son histoire, ses constellations amicales. Souvent devant ses yeux un cercle en mouvement se constituait, le cercle zen parfait ou imparfait n’a plus de mystère pour lui.

Haru engagera un photographe afin de voir grandir Rose auprès des femmes de sa famille. Le visible et l’invisible sont intimement liés pour lui. Nous entrons dans un univers onirique avec ce roman très japonais, les signes sont présents avec leurs synchronicités. On musarde avec les personnages sur les trajets de vie.

Rose pourrait incarner toutes les responsabilités, les choix et les conséquences de la vie de son père, elle pourrait symboliser son héritage positif et négatif et représenter un miroir dans lequel Haru Ueno doit se confronter à lui-même et à ses actions passées. En cela Rose pourrait être essentielle pour son propre cheminement personnel et à sa compréhension de lui-même.

« Une heure de ferveur » est un roman qui explore les thèmes de la spiritualité et de la transcendance, de la quête de sens et de la recherche de soi dans un monde souvent désenchanté. Une lecture intéressante, difficile aussi dans laquelle il y a des tensions et des amitiés très fortes.

Les ombres d’Adélaïde Hills de Kate Morton

Editions charleston 2023

Kate Morton à 16 millions de lecteurs dans le monde et c’est tout à fait justifié. J’ai lu récemment « les ombres d’Adélaïde Hills », c’est un livre fascinant car il mêle mystères et secrets de famille. L’auteure sait associer la fiction historique à la romance.


Nous sommes tout d’abord en 1959 à « Adélaïde Hills » en Australie méridional, Isabel Turner a décidé de s’installer dans une partie du jardin pour un pique-nique familial au bord du ruisseau, à l’ombre d’un chêne. C’est la veille de Noël il fait très chaud ; ses enfants pourront se rafraîchir à leur guise près d’un point d’eau. Elle habite cette belle propriété familiale depuis 14 ans maintenant. Nora sa belle sœur enceinte vient la rejoindre pour l’occasion. Le 24 décembre, Percy Summers, l’épicier du village décide de faire un détour par le domaine des Turner pour faire boire Blaze sa vieille jument, jeune pouliche craintive qu’il avait eu en 1941, elle aime encore galoper et c’est au cours de sa promenade qu’il découvre Isabel et ses enfants, allongés sous un soleil de plomb au bord du ruisseau. Sa première réaction a été de se dire qu’ils dormaient au soleil ; mais l’image se fit de plus en plus nette lorsqu’il s’avança. Toute la famille était allongée, seule une colonie de fourmis montait sur le poignet de la petite fille, il comprit alors qu’ils étaient tous morts, empoisonnés, car il n’y avait ni trace de sang, ni trace de violence, ni d’ecchymose ; rien de tout cela, mais le bébé avait disparu, le panier accroché à la branche la plus basse était vide.


En décembre 2018 à Londres la journaliste Jess Turner reçoit un coup de téléphone urgent lui demandant de rejoindre Sydney le plus vite possible car sa grand mère Nora vient d’avoir un accident. Elle serait tombée du grenier. Jess et sa mère Polly qui a depuis longtemps quitté le foyer, se rendent à Sydney. Mais pourquoi Nora aurait-elle voulu monter au grenier juste après l’arrivée d’une lettre d’un avocat. Nora a-t-elle un lien avec l’histoire de cette maison.


L’intrigue de ce roman est complexe et très bien menée, elle se déroule sur plusieurs époques ce qui pour moi rend l’histoire palpitante. Les personnages sont riches et attachants. Les décors sont évocateurs car ils mêlent passé et présent en explorant des secrets de famille et des amours interdits. Kate Morton excelle à capturer les émotions et le for intérieur de chacun de ses personnages ce qui permet de nous immerger dans leurs expériences et leurs choix. Sa langue très expressive sait nous émouvoir et nous charmer. L’évocation des vérités révélées sont bouleversantes à mes yeux et l’atmosphère des lieux qui ont façonné l’ existence des Turner maintient notre intérêt de lecture. Un coup de coeur.

L’inconnue du portrait

de Camille de Peretti

Calmann Lévy 2024

Je vais vous parler d’un livre que j’ai particulièrement aimé, c’est le portrait d’une inconnue de Camille de Peretti. Tout part d’une histoire vraie, d’un tableau peint en 1910 à Vienne par Gustave klimt. Une jeune femme est représentée avec les épaules dénudées, à la chevelure lâchée affublée d’un chapeau marron puis fut repeint par l’artiste en 1917. Le chapeau et l’étole furent supprimés et les épaules de la jeune femme ont été recouvertes d’un châle fleuri. Puis il fut volé une première fois pour réapparaître en 1996 lorsqu’une étudiante en histoire de l’art, en feuilletant un catalogue s’aperçoit que c’est le même tableau que celui de la jouvencelle. Confirmé par les rayons X ce tableau est bien un repeint de l’artiste. En 1997 le tableau fut volé une seconde fois pour réapparaître en 2019, celui-ci étant parfaitement conservé fut retrouvé derrière un buisson de lierre dans un sac poubelle au pied du musée d’art moderne à Plaisance en Italie. Des tas de questions se posent alors, qui est cette jeune femme, pourquoi Gustave Klimt aurait repeint un tableau alors qu’il ne fait jamais de repeint. On dit aussi qu’elle aurait été le grand amour de Gustave Klimt mais il n y a aucune esquisse la représentant et pourquoi lui avoir enlevé son chapeau et son étole.

Camille de Peretti peut alors imaginer une histoire. L’histoire de cette femme qu’elle appellera Martha. C’est une histoire passionnante mêlant fiction et réalité. Une lecture presque addictive que nous livre ici l’auteure. Camille de Peretti a une imagination débordante et tellement bien maîtrisée avec un style à la fois, sensible, mordant, fastueux et flamboyant pour nous décrire à travers la destinée de ses personnages la vie à Vienne en 1910 en passant par New York lors du krach boursier de Wall Street en 1929 pour nous emmener quatre vingt ans plus tard au Texas dans un cabinet d’avocats. Page après page tel un puzzle, la narratrice recolle les morceaux de plusieurs vies. Un coup de cœur pour cette très belle saga familiale pleine de mystères et de secrets de famille. Un roman à déguster comme du bon vin.

Nos résiliences

d’Agnès Martin-Lugand

Michel Lafon, 2020

Nos résiliences - collector

Une seul instant suffit-il à faire basculer toute une vie ?

Xavier est vétérinaire, son travail lui prend beaucoup de temps mais pour la soirée de vernissage dans la galerie d’Ava, sa femme et pour y rencontrer l’artiste ainsi que les personnes intéressées ou liées à l’art, Xavier prend sa moto pour s’y rendre au plus vite. L’accident arrive, il percute une jeune femme à vélo et tous les deux sont dans un état critique. Les organes vitaux de Xavier ont souffert au moment de l’impact, il est sous surveillance médicale pendant plusieurs jours. Lorsqu’il sort de son mutisme, la culpabilité l’envahit et dans sa quête de reconstruction il devra affronter ses démons intérieurs. Ava aura de plus en plus de mal à communiquer avec lui car il ne veut plus se projeter vers l’avenir ; tout le ramène à sa pseudo-culpabilité et à cette femme qu’il a renversée. Comment faire face à cela. Les personnages de cette histoire sont complexes et nuancés puisqu’ils sont confrontés dès lors à de terribles défis émotionnels.

Ava est une jeune femme au caractère fort et déterminé qui cherchera à surmonter ses difficultés et trouvera son propre chemin pour vaincre sa douleur en s’inventant une sorte de double qui comblera une vie qui lui échappe sans cesse.

J’ai apprécié la force de résilience des deux couples qui s’opposent face à la douleur ainsi que par l’écriture fluide de l’auteure et les thèmes profonds qui l’accompagne sur la reconstruction de deux êtres après les épreuves de la vie.

Tous les vivants de C.E. Morgan

Editions Gallimard, 2020

« Aloma n’avait jamais vécu dans une maison comme celle-ci et maintenant qu’elle la voyait, elle n’était plus très sûre d’en avoir envie mais elle aime Orren, alors supportera-t-elle cette vie dans cette région rude du Kentucky avec des cultures de tabac à perte de vue qu’elle voit au travers des rideaux déchirés de cette vieille maison où les murs de pierre et de terre s’effritent ».

Aloma et Orren sont deux jeunes orphelins ; ce qui les lient et les rapprochent et en même temps quelques différences de caractère les séparent, lui est taciturne et taiseux presque violent, juste rude, elle est douce et sensible et de plus elle est dotée d’un talent rare pour le piano.

Orren sait travailler la terre, ce sol pierreux pourvu d’herbes hautes qu’il travaille et qu’il doit entretenir seul suite à la disparition de sa famille. Les mains d’Orren ont eu l’habitude d’être endurantes celles d’Aloma sont faites pour l’art. Un jour elle décide d’aller à l’église du village car elle sait qu’il y a un piano et elle a tant besoin d’effleurer les touches et d’entendre sa résonance. Bell Johnson le pasteur de Falls Creek lui propose de venir jouer à la messe le dimanche ce qui lui permettra de gagner un peu d’argent. Jouer sera pour Aloma un refuge et une échappatoire à ses tourments intérieurs. Le piano est à la fois une passion et une forme d’expression de ses émotions les plus profondes qu’elle ne peut exprimer autrement qu’à travers la musique. Aloma commence à se sentir tirailler entre désirs et devoirs. Va-t-elle se soumettre aux engagements du couple ?

L’écriture de C.E Morgan est d’une beauté poétique et évocatrice nous transportant à travers les paysages sauvages du Kentucky et nous plonge dans l’intimité des pensées et des émotions des personnages. L’auteure nous entraîne vers les peurs, les tourments et les contradictions de l’âme humaine. Elle nous emmène en procession vers une introuvable terre promise. Le talent de C.E. Morgan s’est imposé à moi dès l’instant où elle a mis en lumière ce très beau portrait de femme déchirée entre son désir de conserver sa liberté et son devoir d’être une compagne courageuse pour Orren.

La passeuse d’histoires

de Séjal Badani

Charleston 2020

Jaya, américaine d’origine indienne en proie à des épreuves personnelles cherche la guérison en se rendant en Inde pour se reconstruire. Sa quête la conduit à Ravi, un intouchable proche de sa famille, qui devient son guide dans sa quête de vérité.

Au fil de son voyage Ravi dévoilera à Jaya l’histoire poignante de sa grand mère Amisha, marquée par les bouleversements politiques de l’Inde pré-indépendante, amours interdits, sacrifices. C’est une immersion émotionnelle que va faire Jaya dans la vie d’Amisha ce qui suscite en nous une grande empathie pour cette femme courageuse et inspirante. Les deux femmes reliant passé et présent, et malgré les décennies qui les séparent, ont des similitudes frappantes dans leurs vies. Jaya en explorant les évènements passés se réconciliera-t-elle avec son histoire personnelle.

Une histoire romanesque qui nous ouvre la porte d’un monde insoupçonné et qui nous pousse à l’humanité et à la réflexion comme beaucoup de romans des éditions Charleston qui sont d’une grande qualité littéraire. Un roman passionnant qui invite aussi au voyage.

Une façon d’aimer

Une façon d’aimer, c’est le portrait d’une femme teintée d’un exotisme suranné.

Une façon d’aimer c’est l’ombre silencieuse des cœurs.

Une façon d’aimer c’est l’art de ne rien dire.

Une façon d’aimer c’est la douce mélodie d’un amour retenu.

Une façon d’aimer c’est l’élégance où chaque sourire est comme suspendu dans l’atmosphère.

Madeleine, fille de maraîchers Nantais va se retrouver transplantée à Douala, au Cameroun pour le travail de son mari, à la fin du mandat français en 1958. C’est après avoir vu une photo de celle-ci que sa nièce décide de percer le mystère qui plane autour de Madeleine qui comme Michèle Morgan semble porter l’héritage du glamour des années révolues.

Et par cette narration, telle une porte ouverte, le lecteur est catapulté vers ce pays lointain le temps d’une œuvre romanesque. Celle-ci nous dévoile avec élégance des atmosphères où l’air s’imprègne d’une chaleur enveloppante et presque suffocante dans laquelle on devine un attrait pour les belles lumières de la nuit. C’est lors d’un bal, un soir que Madeleine rencontra le temps d’une danse Yves Prigent, mi-administrateur, mi-aventurier. La vie de Madeleine aurait pu basculer.

Un amour qui ne sera jamais dévoilé, des sentiments enracinés dans le silence, une affection jamais prononcée. C’est dans cette symphonie des sentiments que cette histoire d’amour révèle son charme.

J’ai été transportée par la plume élégante de l’auteure, qui sait exprimer à demi-mots les émotions sans les dire. Ce roman explore des thèmes intemporels tels que l’amour, la perte et la quête de sens. Un coup de cœur pour ce très beau roman, qui réside dans la délicatesse de la prose, la finesse des descriptions et la subtilité des émotions.

Un soir d’été

de Philippe Besson

@Editions Julliard, 2024

« La vérité, si vous voulez que je vous dise, c’est que je ne suis jamais parvenu à me débarrasser de cette histoire …» « De la nostalgie ? Peut-être… » « Une sorte de manque ? Sans doute … » De la culpabilité ? Celle de n’avoir rien vu venir, dans ce cas. » « Vous savez vous, pourquoi il faut que les belles histoires finissent mal ? »

Comme chaque année, Nicolas, Philippe, François et Christophe se retrouvent le temps d’un été à l’île de Ré pour les grandes vacances. Ils ont 18 ans en 1985, ils sont d’une insouciance déconcertante, presque enfantine. Ils passent leur journée sur la plage au soleil, rient et s’ennuient ensemble, signes d’une vraie amitié.

Cette année là, Alice et Marc des juillettistes tout frais émoulus des quartiers parisiens rejoindront leur petit groupe. C’est aussi le temps des amours, des bières sirotées à la terrasse des cafés et le soir ils vont danser en boîte de nuit.

Mais l’insouciance de la jeunesse, la soif de liberté, l’égoïsme et la désinvolture, euphémisme affectueux pour inconséquence, les empêchent de voir la douleur des autres. Leur vie dégagée de tout embarras va voler en éclat le temps d’une soirée. La légèreté de leur situation va basculer dans la gravité d’une disparition.

L’auteur nous embarque dans une histoire qui nous touche, elle nous rappelle avec de multiples petits détails nos propres souvenirs de vacances. « Un soir d’été » contient à la fois les souvenirs d’enfance de l’auteur et ceux qu’il a reconstitués étant adulte ; peut-être du remords, des regrets de ne pas avoir vu venir.

Avec ce roman, Besson plonge dans des instantanés lumineux cueillis dans sa jeunesse le temps d’un été au milieu des années 80 pour rendre vivant le jeune homme disparu trop tôt, sans oublier la force des chansons qui marqua cette époque. Je vous recommande cette plongée dans ces souvenirs de vacances à l’île de Ré qui exhale un parfum spécial de roses trémières, de vie tranquille et de sensualité amoureuse d’adolescents. Un roman réussi qui vous tiendra en haleine jusqu’à la fin.

Corniche Kennedy

de Maylis de Kerangal

Editions Folio

Il y a là dominant le quai une saillie naturelle, une corniche surplombant un précipice qui se jette dans la mer méditerranée, la Corniche Kennedy. Et c’est de cet endroit que les mecs des quartiers nord de Marseille sautent. Rien n’est sûr pour cette bande d’adolescents qui ont entre 13 et 17 ans. Ils sont surveillés par Sylvestre Opéra, le flic qui est lui-même dans un marasme émotionnel. Tout peut dériver à tout moment dans ce monde cruel, vampirisé par l’esprit des lois d’où les pacificateurs eux-mêmes ne reviennent pas. Il est nécessaire pour ces jeunes de maintenir le cap pour ne pas sombrer, alors ils se jettent d’un premier promontoire puis d’un deuxième, celui qu’ils nomment entre eux le « just do it », une langue de pierre issue de la roche, à 7m au-dessus de la mer. Ils ont la trouille, la peur les broie , ils respirent, ils se raidissent, ils tendent leurs muscles, ils avancent leurs torses, ils déploient leurs bras, ils sont vrais et lorsqu’ils sont prêts, ils sautent. Une fille va les rejoindre d’une drôle de manière, une bourge, pas tout à fait convenable. A ce moment-là commence l’histoire de toutes les déroutes. Les sauts sont interdits, ces délits sont passibles d’amendes. Le flic les surveille avec ses jumelles, il semble être en décrépitude absolue face à ces jeunes éperdus de vie. Ne sont-ils pas vibrants de sensualité et de courage. C’est époustouflant de les voir plonger de si haut, c’est terrifiant et explosif. Ils savent comment s’y prendre pour ne pas se blesser. La plupart d’entre eux ignorent superbement les risques, d’autres les cherchent pour exister. Certains tentent d’obtenir des sensations fortes, d’autres essayent la confrontation à la violence. Tous sont en quête d’impressions indélébiles, images éclatantes de vie. Avec sa plume, Maylis de Kérangal nous emporte là où chacun des personnage veut trouver sa juste place, là où chacun porte en lui de façon obsessionnelle une envie de grandeur et de liberté. Cependant, il surgit tout au long de ces pages graves et puissantes l’idée de fuite pour se confronter à une force de vie. C’est bien là la réussite de Maylis de Kérangal, « Corniche Kennedy » bat au rythme du pouls de l’univers et aussitôt après bascule dans le réalisme le plus quotidien.

Editions Folio

La belle lumière d’Angélique Villeneuve

Editions le Passage 2020

Mais quelle est cette belle lumière dont parle l’auteure à travers la voix de Kate Keller, mère d’Helen, cette petite fille qui a perdu la vue et l’ouïe à cause d’une forte fièvre contractée à l’âge d’un an et demi. Nous sommes au lendemain de la guerre de Sécession dans une petite plantation du sud des Etats-Unis en Alabama.

Kate refusera de se séparer de sa fille malgré ses infirmités qui la rendent de plus en plus sauvageonne et indisciplinée. Elles vont mettre au point toutes les deux des signes de reconnaissance afin de contenter les besoins immédiats d’Helen. Il y a beaucoup d’étreintes et d’amour entre elles, « une porosité et une proximité des corps ». Cultivée Kate découvre au fil de ses lectures qu’il existe un institut à Boston pour les aveugles. Elle fait venir en Alabama Ann Sullivan, jeune irlandaise formée à l’apprentissage du langage pour les sourds. A huit ans, Helen découvre qu’il existe des lettres et des mots pour qualifier les objets et les choses. La lumière du langage va la transfigurer ; de l’enfant sauvage qu’elle était, elle deviendra attentive et sage avec un appétit pour l’étude hors du commun. Helen illuminera le monde entier par sa détermination à défendre le droit des femmes, des handicapés et toutes les personnes vulnérables.

Ce livre magnifique raconte la décennie de la vie d’une mère Kate, une femme de l’ombre derrière laquelle brille une lumière. Avec une écriture délicate, l’auteure rend hommage à la puissance de l’amour maternel.

Un coup de coeur pour ce manchon d’humanité, de liberté, d’amour, de détermination, de tendresse, de force de vie et de respect pour les fragilités humaines.